DOGMA

Angèle Kremer Marietti

Philosophie des sciences de la nature et philosophie des sciences de l’esprit au tournant du XXè siècle :
Conflit ou compromis ?

Université de Naples, le 11 avril 2002
Congresso Filosofia delle Scienze della Natura
e Problemi della Coscienza tra 800 e 900

À propos de la philosophie des sciences et des problèmes de la conscience dans le passage du XIXè siècle au XXè, je vois un problème majeur : il consiste pour moi dans la nécessité de formuler quelques questions de base et naturellement d’y répondre. Il faut d’abord retenir une première opposition entre la ferme assise des sciences de la nature et l’explosion des sciences de l’esprit et s’interroger ensuite sur leur modus vivendi.

1. Deux questions

De ce point de vue, il me semble que deux questions générales se posent. Avant toutes choses, nous devons nous demander, d’une part, quelle est la conscience des sciences de la nature, ne serait-ce que dans la perspective du dicton rabelaisien « science sans conscience n’est que ruine de l’âme » ; or, c’est le rôle de la philosophie de donner cette conscience des sciences de la nature. Cela a été essentiellement le rôle des philosophes des sciences positives[1].
Mais, d’autre part, nous devons aussi et surtout chercher à comprendre les raisons philosophiques pour lesquelles se sont développées et imposées les sciences de l’esprit : or, elles se sont instaurées soit contre les sciences de la nature, au moins partiellement ; soit avec les sciences de la nature, mais selon un statut qu’elles ont défini comme étant tout autre : les deux réactions peuvent d’ailleurs se confondre dans l’entreprise «exemplaire de Dilthey[2] à propos des « sciences de l’esprit » qu’il propose.
Par ailleurs, les philosophes autres que positivistes se sont généralement opposés à l’emprise des sciences de la nature et de leurs méthodes : c’est le cas exemplaire de Bergson.
Je me suis beaucoup interrogée sur la question et j’ai découvert que, si les sciences humaines étaient en pleine évolution dans cette époque transitoire, de leur côté les sciences de la nature, du moins pour la plupart des observateurs, offraient encore globalement le spectacle de la science, que je désigne comme la « science positive » dont le modèle était fondamentalement ce qu’on pourrait appeler la mécanistique.

2. L’assise des sciences de la nature

Voyons donc l’assise reconnue des sciences de la nature. Le matérialisme du XIXè siècle donnait une image simpliste de l’univers[3] : les atomes constituaient un étant inaltérable ; ils se mouvaient dans l’espace et dans le temps en provoquant par leur disposition et leurs mouvements réciproques les phénomènes variés de notre univers sensible.
Même si, dès la deuxième moitié du siècle, cette image avait été quelque peu ébranlée par la science de l’électricité pour laquelle le réel proprement dit n’était plus la matière mais le champ électrique, on pouvait continuer à maintenir, par le détour d’un éther matériel supportant ces champs électriques, la vision matérialiste de la physique de l’atome. On voulait croire que les modifications des champs électriques étaient des processus se déroulant dans l’espace et dans le temps ; et l’on pouvait encore imaginer que les champs électriques étaient provoqués par les atomes : on pouvait même les utiliser pour expliquer le mouvement des atomes. Et, d’ailleurs, lorsque, plus tard, on aura découvert les particules élémentaires telles que les protons, les neutrons et les électrons, on persistera à croire dans une réalité objective fondamentale, sans qu’il soit fait mention des processus d’observation. Mais on remarquait déjà, comme Bergson[4] dans L’évolution créatrice, en 1907, qu’il devenait impossible de se représenter les propriétés, par exemple de l’éther dont on parlait à l’époque, ou même de l’électricité.
Toutefois, il faut pourtant ajouter que des transformations profondes[5] par rapport à cette vue mécanistique de la nature étaient déjà intervenues ; il faut noter, en effet, un certain nombre de nouveautés dans le champ des sciences de la nature : dès 1892, Lorentz (1829-1891) avait commencé la publication d’une série d’articles sur la théorie de l’électron[6], une particule élémentaire chargée négativement dont J.J. Thomson (1856-1940) prouvera l’existence en 1897 ; de plus, en 1895, W. C. Röntgen (1845-1923) avait découvert les rayons X (ou les ondes électromagnétiques). La conséquence directe ne se fit pas attendre, en effet quelques mois plus tard, en 1896, Henri Becquerel (1852-1908) vit dans l’uranium une source de radioactivité, c’est-à-dire l’émission spontanée de particules subatomiques et de radiations électromagnétiques à haute fréquence ; après quoi, Pierre et Marie Curie découvraient en 1898 la radioactivité du radium et du polonium. En 1900 - alors qu’Einstein terminait ses études à l’École polytechnique de Zurich - Max Planck analysait l’équilibre thermique entre matière et rayonnement et découvrait ce qu’il appelait « le quantum d’action élémentaire », en n’usant d’aucune théorie mécanique concernant la théorie de la chaleur. L’hypothèse de Planck était une hypothèse qu’on dit ad hoc, mais sa découverte exprimait quelque chose qu’il était impossible d’énoncer dans l’ancienne mécanique : une équivalence entre énergie et fréquence. En 1905, ce sera l’année miraculeuse, durant laquelle Einstein publiera cinq articles à la base des deux premières révolutions du XXè siècle : celle de la relativité et celle des quanta[7].

Pour revenir à la vision mécanistique de la science au XIXè siècle, on peut se rappeler que, même si Kepler n’avait pu découvrir les rouages exacts de la machine mécanique, il avait ébauché « la fondation réelle de la mécanique céleste »[8] et souligné fermement les harmonies mathématiques sous-jacentes aux phénomènes : il n’avait pu formuler les concepts appropriés de masse et de force, mais il avait permis ce que j’appelle le « tournant mécanique » en faisant passer l’astronomie de la méthode géométrique des Grecs à la méthode de la mécanique rationnelle. Pour Kepler, le monde réel était le monde des phénomènes justiciables de principes mécaniques[9].
Désormais, comme Galilée l’exprima en 1632 dans son Dialogue, la nouvelle physique allait dépendre de la réponse à la question philosophique de savoir quel rôle les mathématiques devaient jouer dans la constitution de la science de la nature. Galilée distingua vitesse et accélération[10] ; il formula le « principe galiléen de relativité » : la Terre donnant l’impression d’immobilité alors que sa vitesse de rotation est de 100.000 km/h. Galilée  ne recherchait pas directement les causes, mais une théorie de la dynamique – Duhem dira de même, au début du XXè siècle, qu’il ne cherche pas les causes mais les principes généraux[11]. Ce qui émerge du recours aux mathématiques, ce n’est autre que la propriété d’invariance des lois scientifiques: les lois de la nature sont des propositions conditionnelles qui autorisent à prévoir certains événements futurs sur la base de la connaissance exacte de leurs conditions présentes. La science moderne procède désormais à la description mathématique de la nature en pratiquant un langage universel qui inclut des exigences logiques.
Ce qui avait commencé dans la mécanique rationnelle s’était poursuivi avec la mécanique newtonienne et l’astronomie mathématique : le détail du mouvement des astres pouvait être prévu par un simple postulat. La notion d’inertie introduite par Kepler (pour lui rien d’autre que la résistance opposée par les corps au mouvement) avait évolué. Descartes, en 1644, dans les Principes de la philosophie, avait conçu l’état de repos comme présentant une force de résistance au mouvement, force que Newton appellera vis insita (exprimée dans sa première loi de mécanique classique) tandis qu’il appellera vis impressa la force du mouvement[12] (exprimée dans sa seconde loi) ; la troisième loi de Newton oppose à toute force d’action une force de réaction.
Newton avait compris que les mêmes lois qui régissent la chute d’une pierre déterminent le mouvement de la lune autour de la terre et que l’on peut les appliquer aux dimensions cosmiques. La révolution scientifique de Newton consista en ce qu’il appliqua, comme l’avait souhaité Kepler, au traitement des corps célestes, les mêmes lois que celles qui déterminent les mouvements terrestres. Avec Newton, l’astronomie est réellement devenue «  plus science qu’aucune autre » selon la parole de Comte[13]. En effet, l’attraction mutuelle entre deux parties de la matière est enfin conçue au sein de la mécanique céleste qui permit de calculer les mouvements célestes sans que la cause ne soit connue. Dans ses Principes mathématiques de la philosophie naturelle (1687), Newton a généralisé les résultats précédemment obtenus pour en tirer la théorie de la gravitation universelle, régissant tous les mouvements des corps célestes, c’est-à-dire l’attraction qui s’exerce entre tous les corps matériels proportionnellement à leur masse réciproque et à l’inverse du carré de leur distance. Dès lors, les lois de la chute des corps découvertes par Galilée et les lois de la révolution des planètes autour du Soleil découvertes par Kepler apparurent comme des cas particuliers de la loi générale de l’attraction universelle de Newton.
La prééminence de la mécanique s’est largement confirmée au XIXè siècle avec les travaux de Lord Raleigh, de Navier et Stokes, de Cauchy et Saint-Venant, enfin de Maxwell. Dans la seconde moitié du XIXè siècle, Ludwig Boltzmann créa la mécanique statistique, qui modèle un système dans les termes du comportement moyen du grand nombre d’atomes et de molécules formant le système : les lois de base de cette théorie découlent de la théorie newtonienne ; on y examine les conséquences de la connaissance incomplète d‘un système mécanique complexe,  aussi le principe du déterminisme y est-il maintenu. À la même époque, Maxwell et Boltzmann créèrent la théorie cinétique des gaz dans laquelle une description statistique des mouvements moléculaires permit d'expliquer toutes les grandeurs caractéristiques des gaz (pression, température, énergie, etc). Quant à Boltzmann, on peut le considérer comme un pionnier de la mécanique quantique pour deux raisons.
1) Son interprétation statistique de la seconde loi de la thermodynamique permit d’introduire la Théorie des probabilités dans une loi fondamentale de physique :voilà qui donnait l’occasion de contredire le préjugé classique du déterminisme. Alors que depuis 1897 Boltzmann l’invitait à utiliser ses méthodes statistiques pour le traitement de la radiation du corps noir, Max Planck attendit 1900 avant d’admettre les méthodes statistiques de Boltzmann.
2) Autre progrès de Boltzmann vers la mécanique quantique : une méthode qu’il utilisait déjà en 1872, l’introduction des niveaux d’énergie discrète[14].
Si le réalisme semble une position épistémologique générale de cette science du tournant du XXè siècle, il faut considérer cependant une théorie phénoménaliste qui s’impose du fait de la considération des phénomènes inobservables – d’ailleurs encore en question aujourd’hui – et qui affirme que seuls les énoncés portant sur des phénomènes observables devraient être considérés comme une connaissance scientifique valide. D’où le but de la science qui serait d'identifier, de classifier et de lier les phénomènes observables entre eux. De ce point de vue, se limiter aux seuls faits observables conduirait à une certitude permanente : un fait expérimental identifié deviendrait ainsi une connaissance immuable et absolu, car tout expérimentateur répétant ladite mesure ne pourrait qu'obtenir le même résultat. La connaissance sur les phénomènes étant considérée comme absolue et immuable, dès lors elle est indépendante de toute condition sociale ou historique. Toutefois, en ce qui concerne les théories abstraites, faisant appel à des entités non-observables, échafaudées à partir de ces mesures, elles ne seraient pas tout à fait valides. Le physicien allemand Ernst Mach (1838-1916) est un représentant de ce mouvement anti-réaliste. Il a apporté de nombreuses contributions dans les domaines de la mécanique, de l'hydrodynamique, de l'électricité et de la thermodynamique ; de même en esthétique. Pour Mach, les lois de la nature ont pour objet de synthétiser l'ensemble de ce qui a déjà été perçu et expérimenté. La concision fait partie des qualités d'une bonne théorie, économe en terme de concepts, ainsi que la simplicité. Dans son ouvrage sur le développement de la mécanique[15], Mach démontre que la masse et la force sont des concepts qui n'entrent jamais simultanément de manière descriptive dans les expériences, mais plutôt seulement à travers l'accélération ; la force, qui est une entité non-observable, n'aurait pas de réalité objective mais une vertu simplificatrice dans l'énoncé des lois physiques. Pour lui, les sensations étaient les phénomènes ultimes, les phénomènes physiques n’étant qu'un ensemble d'éléments sensoriels qui, considérés les uns par rapport aux autres, et du point de vue d’un observateur, apparaissent sous la forme de sensations, sans être des sensations subjectives, mais des propriétés ou des qualités des corps. Ce qui veut dire que les connaissances sur le corps comme tel ne sont pas accessibles, et que seules les connaissances sur les éléments sensoriels qui le composent le sont. Et ces connaissances ne nous parviennent que par nos sensations, notre seule manière de les appréhender. Le problème se pose encore souvent sous cette forme aujourd’hui.
D’une manière générale, comme l’écrit Heisenberg[16], le terme de « Nature » était devenu un terme collectif relatif aux domaines de l’expérience vers lesquels l’homme pouvait accéder avec la science et la technique. L’opposition se faisait déjà sentir entre « explication mécanique » et « description mathématique » de la nature. La nature se déroulait selon des lois dans l’espace et dans le temps. La matière était considérée comme inaltérable dans sa masse, elle pouvait être mue par des forces : les atomes découverts grâce aux expériences chimiques étaient considérés comme les moellons inaltérables de la matière : ils étaient représentés comme se mouvant dans l’espace et dans le temps et provoquant par leur disposition et leurs mouvements les événements variés de l’univers sensible. Cette conception matérialiste persista même avec la science de l’électricité, non seulement dans la seconde moitié du XIXè siècle, mais encore vers 1907, selon ce qu’écrivait Bergson à ce moment-là[17] : « Plus la physique progresse, plus elle montre l’impossibilité de se représenter les propriétés de l’éther ou de l’électricité, base probable de tous les corps, sur le modèle des propriétés de la matière que nous apercevons. »


3. La philosophie de Bergson : son appel à la conscience et à la science

Bergson a cru, dès 1889, apporter des réponses à certaines questions posées par la science ; ensuite, il a voulu – systématiquement – soit imposer ses propres réponses philosophiques contre celles de la science, soit interpréter les résultats scientifiques dans sa perspective philosophique : ce à quoi, naturellement, rien ne l’autorisait si ce n’est une prétendue autorité philosophique.
Par rapport au déploiement – et on a même parlé de « révolution » - du côté des sciences de l’esprit (il s‘agit de la psychologie, de la psychanalyse et de la phénoménologie) et par rapport à la philosophie de Bergson que je propose à votre réflexion, mon hypothèse est que toutes ces conceptions, qui tendent à élargir - et parfois à renverser – l’ancienne rationalité classique, en tout cas son réductionnisme, se faisaient en réaction à la science positive, et surtout à la mécanique, mais pas encore (c’est un peu trop tôt) dans la relation à la crise du déterminisme du début du XXè siècle. Ensuite, il est vrai, au début du XXè siècle, certains vont penser trouver une sorte de justification « après coup » à ce qui peut paraître une poussée d’irrationalisme, en tout cas des réticences bien marquées à l’égard des cadres de la mécanique classique.
Pour ce qui concerne la conscience de soi, ou, pour reprendre une définition de l’idéologie comme comprenant les formes de la conscience à travers lesquelles les individus se représentent leur propre essence (qu’il s’agisse des sciences de la nature ou des sciences de l’esprit), le problème philosophique demeure l’assimilation – je ne dirai même pas philosophique – mais au moins culturelle de ces visions nouvelles du monde et de l’homme. Aussi, lorsque Bergson va soutenir sa thèse, le positivisme a atteint l’interprétation des phénomènes humains et sociaux ; la théorie associationniste explique la vie de l’esprit ; je dirai, dans une métaphore, que les tentacules de la science déterministe ont déjà atteint l’objet de la conscience.
Dans cette perspective et pour s’y opposer, la thèse de Bergson distingue un ordre homogène, celui de l’espace, de la simultanéité et de l’étendue : disons l’ordre de la quantité ; en face de cet ordre homogène, il pose un ordre hétérogène : celui de la durée et de l’inétendue, en un mot, l’ordre de la qualité. Et Bergson va opposer ces deux ordres comme étant l’ordre de la science et l’ordre de la conscience. Donc Bergson pose et résout à sa manière le problème que nous abordons aujourd’hui : « la philosophie des sciences de la nature et les problèmes de la conscience » ; c’est celui-là même qu’il pense résoudre avec l’Essai sur les données immédiates de la conscience. Il range donc la philosophie des sciences de la nature sous la rubrique des sciences de l’ordre extérieur ; et il se réserve pour lui la rubrique de l‘ordre intérieur qui est celui de la conscience. Je n’ai pas dit qu’il prenait sous son aile les « sciences de l’esprit » : ce sera le cas de Dilthey, que nous verrons ensuite.
Avec l’Essai de 1889, Bergson s’empare des problèmes liés à la conscience. Son argument majeur est qu’il n’est pas permis de traduire l’inétendue en étendue ou l’ordre intérieur en ordre extérieur, c’est-à-dire la qualité en quantité. Il faut remarquer au passage que Bergson n’oppose pas l’esprit à la nature, mais bien la conscience « qui dure » à la science « qui exige des repos où poser des repères »[18]. D’où toutes les oppositions qui sont les siennes : outre celles que j’ai dites, celle qui peut se remarquer entre, d’une part, le mouvement indivisible et, d’autre part, l’espace parcouru qui lui est divisible (question évoquée à propos des sophismes éléates[19] de la Dichotomie, d’Achille et la tortue, de la Flèche et du Stade). Le reproche majeur adressé par Bergson à la science, c’est qu’avec la spatialisation elle abandonne la mobilité du mouvement. Par exemple, Bergson critique l’argument de la Flèche de Zénon d’Élée[20], en affirmant que le passage est un mouvement et l’arrêt une immobilité ; ce qui veut dire qu’il se méfiait de la représentation du mouvement comme étant celle d’un point sur une trajectoire. Opposant à la science la conscience, Bergson définit celle-ci comme étant qualité pure, durée, enfin liberté ; en conséquence, il dénonce l’illusion qui confond succession et simultanéité, durée et étendue, qualité et quantité, extériorité et intériorité.
Notons toutefois que Bergson n’oppose pas toujours science et conscience, il dit aussi vouloir tout à la fois faire « appel à la science et à la conscience » dans un article intitulé « La philosophie » et publié dans La science française (Larousse, 1915), dans lequel il prétend constituer, au moyen de l’intuition, « une philosophie capable de fournir, non plus seulement des théories générales, mais aussi des explications concrètes des phénomènes particuliers » ; il ajoutait : « La philosophie, ainsi entendue, est susceptible de la même précision que la science positive »[21].
Or, par rapport aux conceptions bergsoniennes sur la durée et le mouvement, il se trouve que des analogies saisissantes apparaissent avec certains des résultats scientifiques ultérieurs à 1889, en particulier en ce qui concerne les idées de Bohr et de Heisenberg, énoncées quarante ans plus tard[22].
Ainsi, Louis de Broglie concède à Bergson l’idée que la science schématise à l’excès sa représentation du temps et de l’espace. En effet, la succession des événements est projetée sur un axe homogène, de même la localisation des objets dans l’espace est projetée sur l’espace géométrique homogène à trois dimensions. Mais c’est surtout sur le temps que Bergson a voulu insister en opposant la durée concrète au temps homogène et abstrait : il en est ainsi dans le chapitre IV de Matière et mémoire (1896). Il est vrai que la représentation schématique du temps abandonne certainement beaucoup de particularités de la durée concrète. Louis de Broglie s’est intéressé, par exemple, à l’idée énoncée[23] dans l’Évolution créatrice (1907), selon laquelle nous pourrions très bien supposer que le flux du temps opère à une vitesse infime de telle sorte que nous aurions en un seul spectacle et en un seul coup d’œil toute l’histoire passée, présente et future de l’humanité : voilà, écrit Louis de Broglie, une représentation à laquelle « est parvenue la théorie de la Relativité lorsqu’elle nous a invités à figurer l’ensemble des événements passés, présents et futurs dans le cadre d’un continu abstrait à quatre dimensions, l’espace-temps[24]». Et Louis de Broglie explique que cette théorie permet de penser chaque observateur comme découvrant successivement les événements contenus dans l’espace-temps : « à chaque instant de son temps propre, il pourrait regarder comme simultanés tous ceux de ces événements qui sont localisés dans une certaine section plane à trois dimensions de l’espace-temps et, au fur et à mesure que s’écoulerait son temps propre, cette section balayerait progressivement l’espace-temps tout entier »[25]. L’ensemble des événements serait ainsi donné a priori. Mais, justement, Bergson a toujours rejeté cette vision du temps statique. Et Louis de Broglie concède encore qu’en effet cette schématisation de la science classique qui est aussi celle de la théorie de la Relativité laisse peut-être tomber une partie du réel écoulement des choses.
La théorie des quanta pénètre encore plus profondément dans la réalité ; en ce qui concerne la Physique quantique, il en est ainsi de la mécanique ondulatoire et quantique : Louis de Broglie relève alors quelques analogies avec la philosophie de Bergson. Un résultat des théories quantiques est celui de « montrer l’impossibilité d’attribuer simultanément à un corpuscule élémentaire un état de mouvement bien défini et une position entièrement déterminée »[26] : c’est ce qu’expriment les relations d’incertitude d’Heisenberg. Relisant l’Essai de 1889, Louis de Broglie découvre une phrase de Bergson qu’on dirait empruntée à la théorie d’Heisenberg formulée en 1927 : « Il n’y a dans l’espace que des parties d’espace et en quelque point que l’on considère le mobile, on n’obtiendra qu’une position »[27]. Cependant, Bergson maintient l’idée de trajectoire d’un mobile propre à la mécanique classique ; or, il n’en est plus ainsi avec la physique quantique ; seules quelques positions instantanées de l’entité physique en progression peuvent être déterminées par quelques mesures nécessairement discontinues, et encore dans l’ignorance de l’état de mouvement. Par ailleurs, les termes fréquents chez Bergson de « nouveau » et d’ « imprévisible » pourraient convenir, selon Louis de Broglie à la notion de temps dans les théories quantiques où, écrit-il, le temps apporte en effet des éléments nouveaux et imprévisibles[28]. Un parallèle est donc possible entre les notions bergsoniennes et celles des théories quantiques ; car Louis de Broglie n’est pas sans trouver un « parfum de bergsonisme » dans l’exposition de la Physique quantique. En particulier, à propos de la théorie de la causalité : celle-même de Louis de Broglie[29] sur les deux causalités, faible et forte, en comparaison de laquelle l’auteur cite ce passage de Bergson : « Si donc on se décide à concevoir sous cette seconde forme la relation causale, on peut affirmer a priori qu’il n’y aura plus entre la cause et l’effet un rapport de détermination nécessaire, car l’effet ne sera plus donné dans la cause. Il n’y résidera qu’à l’état de pur possible, et comme une représentation confuse qui ne sera peut-être pas suivie de l’action correspondante »[30].
Toutes les analogies relevées par Louis de Broglie et dues à l’expression originale de la pensée nuancée de Bergson n’effacent cependant pas les erreurs de Durée et simultanéité (1922), parfaitement dénoncées et expliquées dans le livre de Sokal et Bricmont, Impostures intellectuelles[31], mais déjà explicitement relevées par Jean Becquerel[32] à la parution de l’ouvrage de Bergson. Louis de Broglie reconnaît que c’est « le moins bon de ses livres »[33], dans lequel Bergson a tenté de tirer à lui la théorie de la Relativité : « ouvrage qui a été justement critiqué parce qu’il semble bien que son auteur ait mal compris le véritable sens des conceptions d’Einstein et de ses continuateurs »[34]. Couronnant la Physique classique, la Physique relativiste pousse à l’extrême la spatialisation du temps et la géométrisation de l’espace : conceptions à l’opposé de celles de Bergson. Comme je l’avais vu dans mon mémoire de Diplôme d’Études Supérieures de Philosophie, « là encore, Bergson dénonce la convertibilité de l’espace en temps et la reconvertibilité du temps en espace »[35] ; et je continuais : « En effet, l’espace-temps ne fait que symboliser une invariance résultant des équations de Lorentz, traduites par l’hypothèse de temps multiples et de simultanéités convertibles en successions. Aussi la réalité espace-temps est-elle purement mathématique et même purement spéculative et ne saurait être perçue par une conscience qui dure »[36]. Bergson voulait imposer le choix entre l’équation d’une part et le temps de l’autre, parce qu’il ne pouvait concilier l’une à l’autre : il s’agissait pour lui du « conflit entre le temps que la science désigne par un simple paramètre et le temps vécu par moi »[37]. Enfin, Bergson niait « le déterminisme sous la forme universalisable du théorème de la conservation de l’énergie dont la gravitation est un exemple, puisqu’elle consiste en ce que les mouvements des masses matérielles dans l’univers réagissent les unes sur les autres, et dans la théorie relativiste où elle consiste en ce que, loin ou près des masses des distributions énergétiques, les géodésiques définissent les mouvements d’une masse d’épreuve et la propagation de la matière »[38]. Mais, justement, la mécanique, qui sera appliquée à de nouveaux domaines tels que l’ aérodynamique, a perdu sa prééminence au XXè siècle ; du moins, elle a subi d’importantes transformations pour être apte - avec la Relativité - à décrire des corps dans un mouvement ultra rapide ; toutefois, dans le domaine quantique, à la découverte duquel elle contribua, elle n’a pu représenter le monde physique.
Beaucoup ont vu en Bergson, et non sans raison, le représentant et l’inspirateur du courant anti-intellectualiste dressé contre la tyrannie de la raison abstraite, qui schématise et réduit la réalité de la vie à l’état de concepts ou de « fumée algébrique ». Il a écrit : « À côté de la conscience et de la science, il y a la vie »[39] ; et il ajoutait : vivre, c’est agir. Il a tenté de mettre sur pied une sorte de monisme de l’unité de l’être, unité étant conçue comme une substance infiniment grande sur laquelle se profileraient matière et esprit, et qui impliquerait une alternative entre le corps et l’esprit dans la mesure où, par exemple dans une métaphysique de la matière, les choses seraient considérées soit du point de vue d’un cercle large, soit du point de vue d’un cercle étroit[40].


4. L’explosion des sciences de l’esprit

Notons que l’expression de Geisteswissenschaften, ou sciences de l’esprit, date du début du XIXè siècle et c’est Dilthey qui l’a popularisée ; certains comme Rickert lui ont préféré la notion de Kulturwissenschaften, ou sciences de la civilisation., en incluant l’histoire mais sans référence à la psychologie.
En fait, les sciences humaines existaient avant Dilthey, et même déjà sous le mode expérimental et positif : Wundt[41], promoteur de la psychophysiologie, avait créé le premier laboratoire de psychologie expérimentale en 1879 à Leipzig. Avant lui, Fechner[42] avait fondé la psychophysique en 1860.
Voyons les événements éditoriaux de la fin du siècle. Le livre fondamental de Durkheim, les règles de la méthode sociologique, paraît en 1895 ; La psychologie des sentiments de Ribot en 1896 et sera suivi en 1905 de La logique des sentiments. Entre 1886 et 1900, Freud établit et publie les règles essentielles de la méthode psychanalytique. Enfin, je ne veux pas oublier le livre de Mach paru en 1882, L’Analyse des sensations, à la base d’une épistémologie sensationniste qui devait rendre inutiles les notions de cause et d’effet, remplacées par la notion de fonction.

Voyons comment Dilthey gère le succès des sciences de la nature. Tentant de réunir la perspective entière des sciences humaines, il fait paraître, en 1875, un ouvrage intitulé De l’étude de l’histoire des sciences humaines, sociales et politiques. Dilthey est une personnalité originale qui a d’abord publié des travaux sur Schleiermacher dont l’herméneutique l’inspirait beaucoup. Mais c’est en 1883 que Dilthey publie une œuvre, tout autant englobante que la première, mais véritablement fondamentale : l’Introduction à l’étude des sciences humaines. L’originalité de Dilthey vient du fait qu’opposé à la métaphysique, il part du point de vue total de la réalité historique, psychologique et sociale, qui est l’objet, d’après lui, des « sciences de l’esprit », qu’il oppose directement aux « sciences de la nature ». Pour Dilthey¸ le règne de la nature est l’ensemble des changements soumis à la répétition automatique des faits naturels faisant partie de l’ordre mécanique. Dans l’Introduction à l’étude des sciences humaines, Dilthey explicite l’objet des sciences humaines : «appréhender la réalité historique et sociale dans ce qu’elle a de singulier et d’individuel »[43]. Ce faisant, il propose donc une étude d’un objet qui peut être scientifique, c’est-à-dire avant tout observable. Les faits à la base des sciences humaines sont les faits psychiques et psychophysiques, qui fondent à la fois la réalité de l’individu et la théorie des systèmes de civilisation. Pour Dilthey il y a une correspondance évidente et réciproque entre l’individuel et le social compris l’un et l’autre dans l’Histoire.
Dilthey est à l’origine de la notion de « conception du monde » (Weltanschaung) – qui peut être implicite ou explicite - et de la distinction entre « expliquer la nature » et « comprendre l’esprit ». À partir d’une « méthode de la compréhension », il veut faire des sciences humaines une sorte d’anthropologie[44], une science humaine globale aux dimensions bio-socio-historiques. Ce qu’il appelle « esprit » s’inspire de Hegel, ce sont les actions humaines interdépendantes, « intériorisées », auxquelles il oppose les mêmes actions mais « objectivées », et qu’il appelle « l’histoire ».

L’intérêt de Dilthey pour le problème qui nous occupe, « la philosophie des sciences de la nature et les problèmes de la conscience », tient au fait qu’il refuse la domination des sciences dites « objectives » auxquelles il oppose les prétendues « subjectives » sciences de l’esprit. Son livre de 1883 sur l’introduction aux sciences humaines a pour objet essentiel de démontrer la nécessité d’une science humaine fondamentale en regard des sciences humaines déjà existantes. Pour Dilthey, l’Histoire doit jouer un grand rôle dans cette entreprise qu’il met à exécution, par exemple, dans Conception du monde et analyse de l’homme depuis la Renaissance et la Réforme, datant de 1891-1893. La « compréhension » qu’il propose dépend de la méthode de la totalité : l’individu engage sa personnalité tout entière pour revivre l’expérience individuelle d’autrui en référence à la vie : on peut s’interroger sur la vie, elle est histoire pour Dilthey et s’explique comme histoire : loin d’être une simple apparence, la vie jouit d’une cohérence temporelle et intentionnelle. Dilthey appelle « ensemble vital » l’ensemble de nos instincts, de notre sensibilité et de notre volonté : c’est une structure dynamique qui dépasse le psychisme ; cet ensemble peut être décrit en tenant compte de la relation organique des parties au tout, et vice versa.
Le rapport à l’interprétation est évident ; celle-ci nous transporte sur des terrains étrangers que nous voulons comprendre : interprétation et compréhension se renvoient l’une à l’autre. La signification qui s’en dégage est la catégorie principale de la vie : toute œuvre comporte un ensemble de signification (Bedeutungszusammenhang) ou une totalité de signification (Bedeutungssgänze) : ce qui implique qu’il faut commencer par dégager des ensembles avant de les interpréter. La signification tient compte d’une « esthétique de l’histoire » liée à une intuition du temps et qui vient faire contrepoids à une esthétique de la nature liée à une intuition de l’espace, telle que celle qui fut avancée par Kant dans l’ « Esthétique transcendantale » de sa Critique de la raison pure. La catégorie centrale de Dilthey demeure l’Histoire, sur laquelle il concentre tous les problèmes épistémologiques.


Conclusion

Le moment est venu de nous interroger sur le modus vivendi qui prévaut, au tournant du XXè siècle, entre les sciences de la nature et les sciences de l’esprit.
À côté de la volonté de puissance philosophique manifestée par Bergson, s’en prenant à la science du point de vue de la conscience, mais en voulant finalement assimiler la science au point de vue de la conscience, à un niveau qui serait supérieur à celui du sens commun, il y a, par exemple, avec Dilthey, quelqu’un qui ne veut pas que la réalité humaine soit traitée selon la méthode des sciences de la nature ; aussi, pour faciliter la tâche des spécialistes en sciences humaines et afin qu’ils ne tombent ni dans le piège de la métaphysique ni dans celui de l’introspection, Dilthey propose un objet qui est la réalité historique et sociale avec la détermination des ensembles historiques et sociaux au sein desquels on retrouve l’individu avec toute son originalité et toute sa subjectivité, mais ayant acquis une signification propre dans ce que Dilthey appelle « l’ensemble de signification » ou la « totalité de signification », et auquel Dilthey donne un statut historique. Dilthey a traité des problèmes de la conscience en les situant dans l’histoire, soit individuelle soit collective, mais de manière à ce que toujours le point de vue individuel et le point de vue collectif soient tenus dans une situation d’échange réciproque.
Des questions identiques demeurent posées en ce qui concerne les problèmes de la conscience, par exemple, en psychiatrie ou en psychanalyse ou dans d‘autres disciplines des sciences humaines.


Bibliographie

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[1] Je renvoie au chapitre IV, « Philosophies de la science positive », de mon ouvrage Philosophie des sciences de la nature, Paris : PUF, 1999 ; ainsi qu’à l’article « Les philosophes de la science positive : Bacon, Comte, Bernard et Duhem », Studi Filosofici, XXII, 1999, Bibliopolis, pp. 189-230.
[2] Je renvoie à mon ouvrage Dilthey et l’anthropologie historique, Paris : Seghers, collection « Philosophes de tous les temps », 1971.
[3] Dans cette description, je suis essentiellement la version donnée par Werner Heisenberg dans son livre La nature dans la physique contemporaine, traduit de l’allemand par Ugné Karvelis et A. Leroy, Paris : Gallimard, collection Idées, 1962.
[4] Voir note 17.
[5] Je renvoie à mon livre Philosophie des sciences de la nature, op. cit., surtout au chapitre V, « Philosophies scientifiques du XXè siècle », pp. 181-257.
[6] Ibid., p. 205, note 5.
[7] Voir Philosophie des sciences de la nature, op. cit., pp. 187-201.
[8] Auguste Comte, CPP, 24è leçon, (Paris, Hermann, I, p. 380).
[9] Voir Philosophie des sciences de la nature, op. cit., chapitre III, « Émergence de la science moderne », pp. 103-104.
[10] Ibid., pp. 108-109.
[11] Pierre Duhem, Essai sur la notion de théorie (1908), Paris, Vrin, 1994, p. 68.
[12] Voir Philosophie des sciences de la nature, op. cit., p.105, note 2.
[13] CPP, op. cit., 2è leçon, p.56.
[14] Information provenant des travaux de Dieter Flamm (1997).
[15] Ernst Mach, Die Mechanik in ihrer Entwicklung historich-kritisch dargestellt, 1883.
[16] La nature dans la physique contemporaine, op. cit., p. 14.
[17] Cf. Œuvres, Textes annotés par André Robinet, Introduction par Henri Gouhier, Paris : PUF (1959), 1970 ; voir L’évolution créatrice, in Œuvres, p. 803.
[18] Voir Angèle Marietti, Les formes du mouvement chez Bergson, Mémoire de Diplôme d’Études Supérieures de Philosophie, Les Cahiers du Nouvel Humanisme, pp. 43-44.
[19] Voir l’Essai, dans Œuvres, p. 75-76 ; Matière et mémoire, dans Œuvres, p.326-328 ; L’Évolution créatrice, dans Œuvres, p. 755-760 ; dans Les deux sources de la morale et de la religion, dans Œuvres, p. 1020 ; dans La pensée et le mouvant, dans Œuvres, p. 1368, p. 1379-1380.
[20] Voir Matière et mémoire, dans Œuvres, p. 328 : « Le même sophisme apparaît plus clairement dans le troisième argument (La Flèche), qui consiste à conclure, de ce qu’on peut fixer des points sur la trajectoire d’un projectile, qu’on a le droit de distinguer des moments indivisibles dans la durée du trajet ».
[21] Cité par Henri Gouhier, dans l’« Introduction » des Œuvres de Bergson (PUF, 1970), p. XXIX.
[22] C’est la constatation de Louis de Broglie, dans son article « Les conceptions de la physique contemporaine et les idées de Bergson sur le temps et sur le mouvement », Revue de Métaphysique et de Morale, 1941, p. 261. L’article est repris en tant que le chapitre IX du livre de Louis de Broglie, Physique et microphysique, Albin Michel, 1947, pp. 191-211.
[23]Il semble que ce soit à la page 784 des Œuvres que se trouve le morceau auquel fait allusion Louis de Broglie : « C’est à l’intérieur du devenir qu’on se serait transporté par un effort de sympathie. On ne se fût plus demandé où un mobile sera, quelle configuration un système prendra, par quel état un changement passera à n’importe quel moment : les moments du temps, qui ne sont que des arrêts de notre attention, eussent été abolis ; c’est l’écoulement du temps, c’est le flux même du réel qu’on eût essayé de suivre. »  
[24] Louis de Broglie, Physique et microphysique, op. cit., p. 195.
[25] Op. cit., p. 196.
[26] Louis de Brogflie, op. cit., p. 199.
[27] Cf. Essai, in Œuvres, p. 74.
[28] Louis de Broglie, op. cit., p. 204.
[29] Voir Louis de Broglie, Continu et discontinu en Physique moderne, Paris : Albin Michel, 1941.
[30] Cf. Essai, in Œuvres, pp. 138-139.
[31] Alan Sokal, Jean Bricmont, Impostures intellectuelles, Paris : Odile Jacob, 1997 ; Le Livre de Poche, 1999 : voir pages 245-270.
[32] Cf. Jean Becquerel, « Critique de l’ouvrage Durée et simultanéité, in Bulletin des Étudiants de Paris, 10, n°2, mars-avril 1923, pp. 18-29.
[33] Louis de Broglie, op. cit., p. 197.
[34] Ibid.
[35] Les formes du mouvement chez Bergson, op. cit., p.22.
[36] Ibid.
[37] Op. cit., p. 23.
[38] Op. cit., p. 24.
[39] Matière et mémoire ‘chapitre IV), voir Œuvres, p.333.
[40] Voir mes articles sur Bergson, dans Carnets philosophiques, Paris : L’Harmattan, 2002.
[41] Wilhelm Wundt, Éléments de psychophysiologie (1873-1874), trad. A. Keller, Paris : Alcan, 1886.
[42] Gustav Fechner, Éléments de psychophysique, Leipzig, 1860.
[43] Wilhelm Dilthey, Introduction à l’étude des sciences humaines. Essai sur le fondement qu’on pourrait donner à l’étude de la société et de l’histoire, traduit par Louis Sauzin, Paris : PUF, 1942. Voir p. 31.
[44] Cf. Angèle Kremer-Marietti, Dilthey et l’anthropologie historique, Paris : Seghers, 1971. Du même auteur, « Le vocabulaire de Dilthey » (Paris, Ellipses, 2002).

 

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